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Cas clinique: Coccidiose


Ce cas clinique décrivait un épisode de coccidiose dans un élevage de multiplication de 200 truies.

13 Octobre 2010
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Description de l'élevage et appel de l'éleveur


Il s'agit d'un élevage de multiplication de 200 truies situé dans une zone de faible densité porcine.
Conduite en 5 bandes toutes les 4 semaines (sevrage à 21 jours).
Une partie des porcelets est engraissée sur place (les mâles). L'autre partie (femelles) est transférée sur un site extérieur.
Au tri, les cochettes destinées aux élevages plein air sont transférées sur un site plein air et inséminées.
Départ des cochettes vers les élevages de production à 7 semaines de gestation.


Statut sanitaire

Aujeszky Indemne
SDRP Indemne
Actinobacillus pleuropneumoniae (2 et 1,9,11) Négatif
Mycoplasma hyopneumoniae Positif
Lawsonia intracellularis Positif

Prophylaxie

Vaccins effectués sur les issues (futures cochettes)
==> 6 semaines d'âge : mycoplasme (mono-injection)
==> Tri (5 mois ½) : rappel mycoplasme
==> 6-7 mois de gestation : Rouget, parvovirus, rhinite.

Appel de l'éleveur

L'éleveur sollicite une visite car il observe depuis 2 à 3 mois sur le site plein air, des diarrhées sur cochettes entraînant une baisse de la fertilité et une dégradation de leur état (amaigrissements). Les traitements à la tylosine mis en place sont inefficaces.


Visite de l'élevage


Nous avons visité le PS/E des cochettes

Post-sevrage

2 lots présents :

Porcelets de 6 semaines d'âge :

- Pas de diarrhée visible,
- Eternuements (10% sur 2 minutes)

Porcelets de 10 semaines d'âge :

- Pas de diarrhée visible,
- Eternuements (7% sur 2 minutes)

Le taux de pertes est très faible (< 1%) et stable.

Engraissement

3 lots présents (14, 18 et 22 semaines d'âge)
- Pas de diarrhée visible,
- Peu de signes respiratoires
Le taux de pertes est également faible en engraissement (environ 2%).

Site cochettes sur caillebotis

Salle de quarantaine

- Pas de diarrhée visible,
- Toux (probablement du mycoplasme).

Salle IA-gestantes

- Diarrhée profuse observée sur une cochette mais l'éleveur me précise que celle-ci provient du site plein-air. Perte d'état plutôt modérée, bonne consommation de l'aliment distribué. Peu ou pas d'efficacité du traitement antibiotique réalisé la semaine précédente (tylosine à 20 mg/kg pendant 7 jours).
- Les autres cochettes ne présentent pas de signe digestif.

Site cochettes plein-air

1er lot (cochettes arrivées depuis 3 semaines) :

- Diarrhée très liquide, verdâtre, observée sur 80% des animaux.
- Amaigrissements marqués sur environ 20% des cochettes.

3 lots précédents (cochettes gestantes) :

- Diarrhée observée sur 30 à 40% des animaux,
- Forte hétérogénéité.



Bilan

- Diarrhée chronique, récidivante, observée exclusivement sur les animaux élevés en plein-air.
- Début des symptômes 8 à 15 jours après leur arrivée.
- Amaigrissements marqués à l'origine de mauvaises venues en chaleurs et d'une baisse de fertilité (75% depuis 2 mois alors que la moyenne annuelle est à 85-90%).
- Faible efficacité de la tylosine car le traitement mis en place au début des symptômes (20 mg/kg/jour pendant 7 jours) ne permet pas de maîtriser cette diarrhée.


Diagnostic différentiel et résultat des analyses


Hypothèses diagnostiques

==>Atteinte bactérienne
• Brachyspires, Lawsonia (mais faible efficacité de la tylosine).
• Autres (salmonelles ?)

==>Atteinte parasitaire

==>Allergie alimentaire : peu probable car les cochettes ont le même aliment en plain-air et sur caillebotis.

Deux sources de contamination sont identifiées :

L'eau de boisson : pourtant du réseau mais contamination possible dans les canalisations.
Le terrain : l'éleveur me précise en effet qu'il n'a pas effectué de rotation depuis plus d'un an en raison de manque de place.

Analyses réalisées

Prélèvements effectués lors de la visite :

- 6 échantillons de diarrhée (prélevée dans le rectum des cochettes atteintes du 1er lot).
- 2 écouvillons.
- 1 prélèvement d'eau (en bout de ligne).

Résultats

o Examen parasitaire

La méthode utilisée est une observation au microscope après enrichissement par flottation
.
L'analyse révèle :

==> Une infestation massive par des ookystes de coccidies (le genre n'est pas formellement identifié : Isospora ou Eimeria),
==> La présence d'œufs de trichures en quantité importante

o Bactériologie

==> Isolement d'E. coli non hémolytique, non sérotypable.
==> Isolement de Salmonella agona après enrichissement

o PCR

Des PCR sont réalisées sur un pool de fèces (+ écouvillons) et sont négatives pour :
=> Lawsonia intracellularis,
=> Brachyspira (hyodysenteriae, pilosicoli, intermedia).

o Analyse d'eau

- Coliformes totaux : 0 (germe/ml)
- Coliformes fécaux (E. coli) : 0
- Streptocoques fécaux : 0
L'eau est donc potable en bout de ligne.

Conclusion : Forte suspicion d'atteinte parasitaire.


Mesures prises et évolution du cas


Mesures prises

1) Traitement préventif

A l'arrivée sur le site plein-air :
- Toltrazuril : 2 mg/kg/jour pendant 3 jours (soit une posologie de 6 mg/kg).
- Oxybendazole : 5 mg/kg/jour pendant 3 jours (soit une posologie de 15 mg/kg).
- Arrêt de la tylosine.
Les médicaments sont distribués à l'auge avec l'aliment.
Les cochettes sont en groupe de 15 et c'est pour cette raison que la distribution est réalisée sur 3 jours (en effet, en une prise, il y a un risque plus important que tous les animaux du groupe n'aient pas la même dose).

2) Traitement curatif

Toltrazuril à 3 mg/kg/jour pendant 3 jours

3) Mesure complémentaire

Il a également été décidé de revoir la rotation des terrains

Evolution du cas

Un mois plus tard, 3 lots de 15 cochettes du même âge ont été traités à l'arrivée :

- Très bonne efficacité sur 2 lots,
- Efficacité moyenne sur un lot (toujours quelques cochettes avec de la diarrhée mais moins d'hétérogénéité).

En curatif, le traitement semble assez efficace.

Bilan :

Le traitement préventif est relativement efficace; il a toutefois été décidé d'utiliser la dose curative de toltrazuril pour le traitement préventif (soit 3 mg/kg/jour pendant 3 jours).
L'efficacité du traitement confirme bien l'origine parasitaire (coccidies principalement) des signes digestifs observés.


Commentaires

Ce cas clinique décrivait un épisode de coccidiose.

Les coccidies sont des protozoaires, parasites intracellulaires, rencontrés chez de nombreuses espèces de mammifères (chien, chat, porc, sanglier, volailles, homme, …).
Le genre rencontré le plus fréquemment chez le porc est Isospora suis qui affecte essentiellement les porcelets sous la mère et qui est considéré comme asymptomatique chez l'animal adulte. L'autre genre de coccidies infestant le porc est Eimeria, parfois pathogène chez le jeune adulte et qui, même s'il n'a pas été identifié au laboratoire, est probablement dans le cas présent, responsable des signes digestifs observés.

Comment expliquer l'apparition de la maladie ?

- Par des animaux parasités : faune sauvage (sangliers),
- Par des vecteurs vivants : rougeurs, insectes, animaux domestiques (chien, chat),
- Par l'eau de boisson (peu probable car provenant du réseau).

Les animaux malades excrètent par la suite une grande quantité d'ookystes dans le milieu. Ces ookystes sont très résistants (plusieurs mois, voire plusieurs années) et peuvent donc contaminer les animaux des bandes suivantes.

Facteurs favorisants

- L'absence de rotation. En effet, la rotation permet de diminuer la pression d'infection.
- La saison : la prévalence de la coccidiose serait plus élevée au printemps en raison d'une augmentation de la température qui favorise la sporulation des ookystes (les diarrhées sont dans le cas présent apparues en mars).

Le traitement

Il est généralement admis (tout du moins pour la coccidiose du porcelet à I. suis) que le traitement curatif est peu efficace et qu'il faut avoir recours à un traitement préventif après la mise-bas. En effet, lorsque les premiers symptômes surviennent (vers 10-15 jours d'âge), la destruction cellulaire est déjà importante et il est donc trop tard.
C'est pour cette raison que l'aspect le plus important du plan mis en place est le traitement préventif à l'arrivée des cochettes (il faut néanmoins noter que le traitement curatif a également eu une certaine efficacité).
L'anticoccidien le plus largement utilisé en production porcine est le toltrazuril (à la dose de 20 mg/kg en une prise pour le porcelet de 3 à 5 jours d'âge).
La dose pour un animal adulte n'est pas déterminée (nous avons ici fait le choix de 9 mg/kg). La dose a été fractionnée (sur 3 jours) afin que les cochettes qui sont en groupe aient une chance plus importante d'avoir une dose complète.

Dr Guillaume FRIOCOURT
Vétérinaire
22 - LOUDEAC

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