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Cas clinique: Diarrhées récurrentes sur les porcelets et problème électrique

Ce cas décrit des diarrhées récurrentes sur les porcelets dans les premiers jours de vie depuis plus de 5 ans et avec une morbidité de 80% et peu de mortalité dont l’origine s’est révélé être des fuites électriques.

28 Décembre 2009
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Description de l'élevage et problématique de l'éleveur


Situation de l'élevage

Naisseur engraisseur situé en Côtes d’Armor.
450 truies productrices en 10 bandes toutes les 2 semaines depuis juin 2008 suite à un rassemblement de 2 troupeaux (200 truies avant).
L’objectif est de 45 mise-bas par bande.
Elevage sur 3 sites et des engraissements extérieurs.
L’aliment, les cochettes et les doses d’IA sont achetés à l’extérieur.

Description de l'élevage

Site 1
Quarantaine : 2 lots de cochettes, 18 cochettes par lots toutes les 4 semaines.
Verraterie : truies bloquées
Maternité : 4 salles de 20 places et 1 salle de 10 places
Une nurserie : 450 places en 2 salles


Site 2
Gestantes
2 post-sevrages ; arrivée toutes les 4 semaines

Site 3
2 post-sevrages et 1200 places d’engraissement

Présentation de la problématique de l'éleveur

* Les porcelets présentent de la diarrhée en maternité dans les premiers jours de vie. La morbidité est importante : 40 à 80% des porcelets sont atteints. La mortalité est faible. La problématique existe dans l’élevage depuis plus de 5 ans.

* Les résultats GTTT :

GTTT élevage
du 01/01/2008 au 31/12/2008
GTTT élevage
du 01/01/2009 au 01/09/2009
Résultats IFIP Bretagne
du 01/07/08 au 30/06/09
Sevrés/tr prod./an
28.78
29.18
28.3
Nés totaux/portée
14.13
13.76
14.1
Nés vivants/portée
12.99
12.82
13.1
Sevrés/portée
11.57
11.51
11.4
% pertes / nés totaux
18.1
16.3
19
% pertes / nés vifs
10.9
10.2
12.9


* Les porcelets reçoivent entre 3 et 4 injections d’antibiotique pour maitriser les diarrhées.


Axes de travail et présentation de la conduite d'élevage


Axes de travail pour le suivi

Identifier les germes en cause :
o Colibacilles
o Entérocoques
o Clostridies …

Travailler sur les facteurs de risque :
o Qualité de la vaccination
o Confort des animaux
o Qualité de l’eau de boisson
o Conduite alimentaire
o Comportement des animaux à la mise-bas

Présentation de la conduite d'élevage

Quarantaine

- Réception de 18 cochettes toutes les 4 semaines
- Les cochettes restent 8 semaines en quarantaine
- Elles étaient alimentées à l’auge en 2 repas avec de l’aliment jeune reproducteur au début de l’analyse du cas et au nourrisoupe à sec et à volonté avec de l’aliment gestante depuis.
- Vaccinations :

Vaccin
1ère injection
2ème injection
Porcilis PRRS
A l’arrivée
Parvoruvax
2 semaines
5 semaines
Néocolipor et Tasvax
3 semaines
6 semaines

- Une injection de Draxxin à l’arrivée.

Verraterie

- Sevrage le mercredi matin
- Bâtiment sur caillebotis, truies bloquées avec une bonne luminosité.

Gestante sur le site 2

- Bâtiment sur caillebotis.
- 2 repas de soupe et 1 ou 2 repas d’eau.
- Quantité d’aliment : 2,25 kg de l’arrivée dans le bâtiment jusqu’à un mois avant mise-bas et 3 kg le dernier mois de gestation.
- Vaccination : Néocolipor 3 semaines avant mise-bas et Tasvax 4 semaines avant la mise-bas. Pour le SDRP, une vaccination de masse est réalisée 3 fois par an avec le Porcilis PRRS.
- Antiparasitaire : Daclo + Taktic 7 jours avant mise-bas.

Gestante sur le site 1 depuis août 2009

- Caillebotis.
- Conduite identique au site 2.

Maternité

- Sur caillebotis.
- Conduite en 10 bandes avec des mise-bas tous les 15 jours.
- Sevrage à 21 jours.
- Alimentation au doseur et abreuvement par distribution automatique d’eau dans l’auge.
- Utilisation de Dinolytic après mise-bas.
- Les porcelets sont vaccinés contre le mycoplasme en nurserie.


Etat des lieux sur les diarrhées


Diarrhée :

Apparition entre 1 à 3 jours de vie et rechutes possibles 5 à 8 jours après traitement
80% des portées avec diarrhée et rechute après traitement


Diarrhée liquide jaunâtre.

L’expression ne dépend pas du rang de portée des truies

Pas d’efficacité réelle des antibiotiques sur porcelet avec soit inefficacité soit rechute (Multibio, Potencil, Nuflor, Marbocyl, Amoxicilline et Draxxin). Essai de traitement des truies avec du Spirovet également sans résultat.

Analyses de porcelets :

Dates analyses
Nb porcelets
Résultats
Traitement
Efficacité
Fév 08
1
Présence Streptococcus spp Potencil et Vetrimoxin Amélioration dans les premiers jours mais rechutes nombreuses
PCR Entérocoques négative
Absence de colibacille
Mars 09
2
Entérococcus hirae Amoxicilline et Potencil Bonne réponse sur une bande puis réapparition de tous les symptômes sur les bandes suivantes
Colibacille
Clostridium
Mai 09
2
Absence d’entérocoque Baytril, Potencil ou Amoxicilline Nombreuses rechutes
Présence faible de Clostridium et colibacille non typable

Porcelets

Visite le jour de la mise-bas : bon aspect et bonne tonicité des porcelets en général. Sur certaines bandes les porcelets à la naissance paraissaient plus hétérogènes et plus légers mais sans relation avec les diarrhées. Le nombre de nés vivants est légèrement inférieur à la moyenne bretonne.

Visite 5 à 6 jours après mise-bas : les porcelets paraissent creux


Autres pathologies

Qualité urinaire des truies

Un entretien urinaire sur les truies avant mise-bas est réalisé systématiquement avec une poudre orale à vocation diurétique

Observation des vessies et utérus à l’abattoir en septembre 2008 : bonne qualité des cols et cornes des utérus, des vessies sur 3 truies (un peu de dépôt purulent dans la vessie d’une vieille truie).
Analyses d’urine en mai 2009 : sur 16 truies prélevées, 3 présentaient des urines troubles et 2 révélaient des bandelettes positives à l’indicateur « nitrite ».
Le traitement des truies avant la mise-bas avec de la flumequine n’a eu aucun effet sur les diarrhées des porcelets

SDRP

En début de suivi les truies sont vaccinées avec l’Ingelvac PRRS. A la sortie du site de naissage, les porcelets de fin de post-sevrage sont négatifs en sérologie (88 jours). Les charcutiers se positivent en engraissement vers 120 jours.
Mise en place d’un protocole de maitrise du SDRP en juin 2008. La vaccination est alors réalisée sur truies et porcelets avec du Porcilis PRRS.

Santé des truies

Absence de constipation, pas de problème d’aplomb, absence à priori de métrite ou de mammite, appétit régulier après mise-bas, truies plutôt hétérogènes en 2008 suite au rassemblement de 2 cheptels.

Anémie des truies et des porcelets

Mesures du taux d’hémoglobine sur les truies en février 2009


Des mesures du taux d’hémoglobine ont été également réalisées sur les porcelets le jour de la mise-bas avant et après une cure d’Hématonic de 3 semaines sur les truies avant mise-bas.
Avant la cure, le taux moyen sur 24 porcelets était de 84 g/l
Après la cure, le taux moyen sur 32 porcelets était de 94 g/l
L’amélioration des résultats des taux d’hémoglobine sur les porcelets à la mise-bas de 12% a été sans effet sur les diarrhées.


Etat des lieux sur les facteurs de risque


Qualité de la vaccination

La température de conservation des vaccins était non respectée en 2007. La température du réfrigérateur était à 0°C alors que la température de conservation des vaccins doit se situer entre 2 et 8°C. Il y a eu un changement de réfrigérateur fin 2007 et une reprise des vaccinations en double injection pour les colibacilles et les clostridiums.

Des prélèvements de colostrum ont été réalisés en juin 2009 sur 20 truies pour apprécier la qualité de vaccination. Le vaccin a été changé 2 bandes avant les mesures ce qui peut expliquer des résultats insuffisants sur certaines adhésines les truies n’ayant pas reçu une double injection avec le nouveau vaccin (Porcilis Porcoli Diluvac Forte)

Profil colostral de réponse vaccinale Porcilis Porcoli Diluvac Forte globalement correct.

- La qualité de la vaccination est appréciée satisfaisante chez 13 animaux sur 20, et pour 3 autres moyenne.
- Les 4 animaux dont la vaccination est insuffisante, ne sont toutefois pas totalement dépourvus d'anticorps, les titres atteints pour 2 catégorie d'anticorps dirigés contre deux adhésines (celles du K88) sont même classés "bons" chez ces derniers.

Confort des animaux et propreté

Vérification de la température des nids des porcelets au niveau des plaques chauffantes
Nettoyage et désinfection dans les règles
Séchage des porcelets à la naissance
Soins aux porcelets : règles de désinfections respectées
Peu de déplacement des porcelets

Qualité de l’eau de boisson

Des analyses d’eau ont été réalisées en février 2008. Un dépôt de fer important ayant été observé, la réserve d’eau a été changée. Un traitement bactériologique de l’eau a été mis en place.

Conduite alimentaire

La ration des truies en gestation a été modifiée dés le début du suivi pour travailler sur l’homogénéité et le poids des porcelets à la mise-bas. L’amélioration des poids des porcelets à la naissance et de leur homogénéité a été observée. Avec la meilleure qualité des porcelets à la naissance, les diarrhées dans les 48 premières heures de vie ont disparu mais l’apparition des diarrhées entre 3 et 5 jours d’âge a persisté. Ces diarrhées sont réapparues avec le rassemblement des 2 cheptels et une hétérogénéité des truies à l’entrée en maternité.
Des essais de transition alimentaire, aliment gestante / aliment allaitante, plus tôt ou plus tard autour de la mise-bas n’ont pas eu de résultat.
La courbe d’augmentation de la ration après mise-bas est régulière.
Qualité de l’aliment distribué : l’aliment allaitante était stocké dans un vieux silo humide avec une couche d’aliment collé et moisi relativement importante. Le changement du silo a eu lieu en janvier 2009 mais il n’y a pas eu d’effet sur les diarrhées.

Comportement des animaux à la mise-bas

L’éleveur se plaint de nervosité des truies au moment de la mise-bas sans agressivité.

En mai 2009, nous réalisons un suivi approfondi des mise-bas pendant 5 jours à partir de la mise-bas. Différentes mesures et observations sont réalisées tous les jours : prise de la température rectale, palpation de la mamelle pour observer les œdèmes mammaires, consommation des truies, et observation des écoulements pendant 5 jours.

Résultats :

Mauvais démarrage en lactation : faible éjection du lait 12h après mise-bas
Des écoulements sont observés sur certaines truies 4 jours après la mise-bas et la délivrance peut avoir lieu plusieurs heures après la mise-bas. La sergotonine en fin de mise-bas a été mise en place ce qui a permis d’éliminer les écoulements sans effet sur les autres observations ni sur les diarrhées.


30 à 40% des truies présentent des hyperthermies supérieures à 39°C le lendemain de la mise-bas. Exemple de résultats sur 2 bandes :

Date MB
J-1
J0
J+1
J+2
J+3
J+4
°C
>39
>39,5
>39
>39,5
>39
>39,5
>39
>39,5
>39
>39,5
>39
>39,5
14/05/2009
20 truies
0
4
2
7
10
5
7
28/05/2009 40 truies
0
10
4
10
4
4
6
9
3
6
1

Protocole d'intervention

Un protocole d’intervention est mis en place en fonction des observations :

- Distribution de paracétamol aux truies autour de la mise-bas
- Utilisation d’un anti-inflammatoire en injectable sur les truies lorsque la température dépasse 39°C
- Traitement des truies à partir de 39,5°C de température rectale avec un anti-inflammatoire et un antibiotique.
- Traitement avec un produit diurétique lors d’apparition d’œdème mammaire.


Un dernier point essentiel et conclusion


Un dernier point essentiel

Une amélioration a été notée mais à quel prix et qu’est-ce qui dérange les truies ?

Des différences de potentiels importantes sont mises en évidence dans les maternités entre les différentes masses métalliques. La différence de potentiel monte à 1,5 volt voire plus.
Il n’a pas été mesuré de différence de potentiel au niveau de la truie (entre le caillebotis, la case ou l’auge). La différence de potentiel est retrouvée entre le caillebotis et l’abreuvoir du porcelet.

Suite à l’intervention d’un ingénieur électricien, une mise à la terre des différentes parties métalliques des maternités a été réalisée sur une grille de terre. Les mesures entre différentes parties métalliques n’ont plus révélé de différence de potentiel. L’arrivée d’eau n’étant pas encore mise à la terre, du 50 Hertz est retrouvé dans l’eau et une différence de potentiel de 70 mVolt existe encore entre le caillebotis et l’abreuvoir des porcelets. La mise à la terre de l’eau est prévue.

Sur les 2 séries de mise-bas qui ont suivi des améliorations ont été notées :

- Le nombre de truies ayant présenté des températures rectales au dessus de 39°C dans les jours suivant la mise-bas a fortement diminué. Seulement 4 ou 5 truies sur 40 ont reçu des injections d’anti-inflammatoire.
- Les truies étaient plus calmes à la mise-bas (ainsi que les éleveurs !) et donnaient mieux leur lait. L’arrêt d’éjection de lait 12h après mise-bas n’a pas été observé.
- Les porcelets ont tous reçu une injection de Baytril et moins de 20% ont présenté des rechutes. Les rechutes étaient ciblées sur les cochettes. La consommation d’antibiotique pour les diarrhées des porcelets a été divisée par plus de 2.
- Il faut noter que dans le même temps des améliorations ont été apportées au chauffage des plaques (chauffage plus régulier et plaques plus sèches) et que les soins ont été reculés de 2 ou 3 jours (à 6 ou 7 jours d’âge). L’essai sur des soins plus tardifs avait déjà été réalisé sans résultat.

Conclusions

L’élevage décrit ci-dessus nous a demandé de nombreuses observations. La problématique de départ était une sensibilité digestive sur 80% des porcelets dans les jours suivant la mise-bas.

Dans un premier temps, il y a eu beaucoup d’observations déroutantes. Les analyses sur porcelets étaient non répétables. Les réponses aux différents aux antibiotiques étaient plus ou moins différentes d’une bande à l’autre avec systématiquement des rechutes. L’exploration des différents facteurs de risque n’a pas donné de réelle réponse.

Le suivi des observations nous a permis de mettre en évidence un comportement des truies anormal sans réelle pathologie. Les truies présentaient un comportement nerveux sans agressivité. L’éjection des délivres était longue avec une éjection de lait moyenne mais des mise-bas rapides. Les prises de températures rectales ont mis en évidence des légères hyperthermies durant 3 à 5 jours et pour plusieurs truies entre 39 et 39,5°C.

Dans ce cas, l’électricité était un facteur important qui nous a permis d’améliorer le confort des truies et de diminuer la sensibilité digestive des porcelets dans les premiers jours de vie. Même si les autres approches n’ont pas résolu le problème elles ont permis de le maitriser : taux de perte sur nés vivants et nés totaux meilleur que la moyenne IFIP Bretagne.

Il nous reste à travailler plusieurs facteurs : sensibilité des cochettes aux diarrhées néonatales, suivi de la qualité urinaire des truies à l’entrée en maternité, homogénéité de troupeau de truie. Nous allons également observer le niveau de prolificité futur des truies qui ont passé leur lactation dans les maternités mises à la terre.


Commentaires

Le présent cas clinique concerne un élevage naisseur engraisseur situé en Côtes d’Armor avec 450 truies en 10 bandes toutes les 2 semaines.

La problématique de l’éleveur était principalement des diarrhées récurrentes sur les porcelets dans les premiers jours de vie depuis plus de 5 ans et avec une morbidité de 80% et peu de mortalité.

Dans un premier temps nous avons recherché le ou les germes en cause. Les analyses se sont révélées non répétables d’une bande à l’autre. De même, les réponses aux traitements étaient variables d’une bande à l’autre mais toujours avec des rechutes.

Nous avons travaillé ensuite sur les facteurs de risque connus sans réel résultat.

C’est la réflexion sur le confort des truies qui nous a permis d’avancer sur la problématique.

Dans un premier temps, il a été difficile d’admettre que les diarrhées n’étaient pas liées à un germe spécifique. Puis nous avons mis en place des mesures et des notations journalières pour mettre en évidence l’inconfort des truies. La prise de température rectale pendant les 4 jours suivant la mise-bas, les palpations journalières des mamelles également pendant 4 jours, l’observation des écoulements et de la consommation ont permis des interventions rapides et également la mise en évidence de nombreuses température rectales supérieures à 39°C.

Dans ce cas l’origine de l’inconfort s’est révélé être des fuites électriques. La mise à la terre sur les conseils d’un ingénieur électricien a permis d’améliorer le comportement des truies après mise-bas et surtout la sensibilité digestive des porcelets. Le pourcentage des porcelets présentant de la diarrhée est passé de 80 à 20%. L’objectif aujourd’hui est de travailler sur les 20% par le suivi de la qualité urinaire des truies à l’entrée en maternité (bandelettes urinaires), l’homogénéité du troupeau de truie et la qualité des cochettes entrant en maternité.

La participation active de l’éleveur sur toute la démarche et pour toutes les mesures a été indispensable et nous a permis d’aboutir à l’approche électrique.




Dr Régine CHAPON
Cabinet CELTIVET
22 - PLOUMAGOAR

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