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Le PCV2 dans la reproduction expérimentale de la MAP : agent nécessaire, mais non suffisant ?

Au plan scientifique, il ne suffit pas de suspecter un agent donné comme étant la cause X, possible d'un tableau clinique déterminé ou d’une affection. Il faut encore démontrer ce lien de causalité, par des infections expérimentales.

Infections expérimentales simples : que provoque le PCV2 chez un porc ?

Au plan scientifique, il ne suffit pas de suspecter un agent donné comme étant la cause X, possible d'un tableau clinique déterminé ou d’une affection. Il faut encore démontrer ce lien de causalité, par des infections expérimentales. En infectiologie, ces étapes ont été établies au XIXe siècle par Koch, et adaptées par la suite.

Depuis 1999, un très grand nombre d’articles scientifiques ont décrit des infections expérimentales par le PCV2 de porcs de différents statuts sérologiques (séronégatifs ou non). Les animaux utilisés peuvent avoir des origines divergentes : axéniques, naissance par césarienne et privation de colostrum, isolement dès la mise-bas et privation de colostrum, conventionnels, EOPS, etc. Les âges sont très variables (de 2 jours à 2-3 mois d’âge au moment de l’épreuve virale), tout comme le titre infectieux de l’inoculum de PCV2(de 102 à 107 TCID50 par porc).

Les résultats ont aussi été très variables. Selon les expérimentations:

quelques infections sub-cliniques, avec l‘absence de maladie, mais présence de légères lésions histologiques typiques de MAP dans les organes lymphoïdes,

des infections sub-cliniques chez la majorité des animaux inoculés, mais avec un faible nombre (5 à 10 %) présentant un tableau clinique très proche de celui de la MAP, à l’image de ce qui a été observé sur le terrain,

de la MAP sur un nombre relativement élevé de porcs inoculés, avec mortalité (ou nécessité d’euthanasie) occasionnelle de quelques uns,

de la MAP et de la mortalité (ou nécessité d’euthanasie) sur un nombre relativement élevé des porcs inoculés.

La forte variabilité de ces résultats expérimentaux a suggéré différentes hypothèses :

• soit "le problème est dans le virus", et seuls quelques isolats de PCV2 sont pathogènes (hypothèse de la variabilité pathogénique du PCV2),

• soit "le problème est chez le porc", et la sensibilité à la MAP dépend du porc et non du virus (hypothèse de la réceptivité de certaines lignées porcines vis-à-vis du développement de la maladie clinique),.

• soit "le problème est dans une interaction entre le porc, son milieu et les conditions ou les pratiques d’élevage", et l’existence d’autres facteurs (non génétiques) présents chez le porc ou dans les conditions de production facilite la sensibilité à la maladie clinique. C'est l'hypothèse de la multifactorialité,

• soit c’est l’hypothèse de “l’agent X”, et il y a un autre facteur infectieux majeur, différent du PCV2.

Actuellement, on ne peut écarter ni confirmer avec certitude aucune des trois premières hypothèses à l’exclusion des autres. La quatrième a été explorée par différentes équipes, en vain. Les reproductions expérimentales ont fourni des arguments à la fois en faveur et à l’encontre de chacune des trois premières.

1. L’hypothèse aujourd’hui considérée en Europe comme la moins probable est celle de la variabilité pathogénique des différents isolats de PCV2. Elle est confrontée au fait que des différences génétiques très faibles (un ou deux codons) entre isolats présents dans une même exploitation, où le tableau clinique de la MAP a évolué au cours du temps. Mais des isolats de PCV2 issus d’exploitations “avant” l’apparition de la maladie clinique sont également capables d’induire des signes cliniques lors de reproduction expérimentale.

2. La deuxième des hypothèses, une sensibilité génétique du porc, est liée à de multiples observations de terrain, mais est peu étayée par les données scientifiques. En France, elle n’a pas été confortée par les résultats des analyses épidémiologiques.

3. La troisième des hypothèses est probablement la plus proche d’être avérée car les infections expérimentales par le PCV2 permettent de reproduire le tableau clinique de MAP de manière significative et répétitive. Elle fait appel aux reproductions expérimentales complexes, puisqu’elle repose sur l’idée que le résultat final de l’infection par le PCV2 par rapport à l’apparition de la maladie est une interaction entre les éléments des trois hypothèses.

Dans tous les cas, notre connaissance actuelle de la MAP montre qu'il s'agit d'une maladie multifactorielle.

La difficulté ou l’impossibilité d’obtenir un modèle expérimental répétable de la maladie en n’utilisant que le PCV2 comme inoculum a logiquement contribué à la controverse sur le lien de causalité de ce virus avec la pathologie observée sur le terrain (voir ce chapitre).

Infections expérimentales complexes : le PCV2 et les autres

En 1999, une publication rapportait les résultats d’une infection expérimentale de porcs par le PCV2, dans laquelle certains animaux avaient subi une co-infection accidentelle par le parvovirus porcin (PPV). Or ces animaux étaient ceux qui présentaient le tableau clinique de MAP le plus sévère. Les auteurs de cet article proposaient : « sachant que le PCV2 a été isolé à partir d’un porc qui présentait en même temps une infection par le PPV, il est possible que le développement “naturel” de la maladie clinique soit une co-infection par le PCV2 et le PPV ».

L’inoculation expérimentale conjointe de PCV2 et PPV chez des porcs séronégatifs vis-à-vis de ces agents permet de reproduire la maladie clinique observée sur le terrain (MAP) de façon significative et répétée, sur environ 80 % des animaux inoculés. Cet "incident" scientifique est devenu un axe de recherche, à l’image de ce que suggéraient ces auteurs :

" Bien que le PPV puisse aussi circuler en engraissement, c’est relativement peu fréquent. Sachant que la MAP semble plus grave dans ces cas de co-infection avec d’autres agents, peut-être faudrait-il le démontrer expérimentalement, par l’inoculation conjointe du PCV2 et d’autres agents plus fréquents dans la tranche d’âge où la MAP est observée sur le terrain ".

La co-inoculation expérimentale du PCV2 et du virus du SDRP à des porcs séronégatifs vis-à-vis de ces agents permet de reproduire la maladie clinique observée sur le terrain (MAP) sur 10 à 30 % des animaux inoculés.

"Si, en utilisant la co-infection par le PPV ou le SDRPV avec le PCV2, le nombre de cas de MAP est plus important que dans un lot inoculé par le PCV2 seul, et sachant que tous ces agents interagissent avec le système immunitaire du porc, que se passerait-il lors de stimulation expérimentale du système immunitaire sur un porc inoculé par le
PCV2 ?
"

La stimulation non spécifique du système immunitaire de porcs axéniques infectés par le PCV2 permet de reproduire la maladie clinique observée sur le terrain (MAP) de façon significative et répétée sur 80 % des animaux. Mais ces résultats n’ont pas été confirmés dans d’autres modèles. Aussi, ces résultats expérimentaux ont-ils suscité un débat important quant au lien entre vaccins ou produits immuno-modulateurs administrés dans le jeune âge du porcelet et le déclenchement de la MAP chez des porcs infectés par le PCV2.

Toutefois, d’autres résultats, même contradictoires ont été obtenus, dans des reproductions expérimentales comme par des études terrain, en rapport avec un effet possible de l’immunostimulation.

Degrés divers de résultats obtenus lors d'études expérimentales et de terrain
Immunostimulation

Lésions
microscopiques d'intensité majeure
Très grand pourcentage

d'animaux malades

Immunostimulation
Lésions
microscopiques d'intensité majeure
Très grand pourcentage

d'animaux malades
Immunostimulation
Lésions
microscopiques d'intensité majeure
Très grand pourcentage

d'animaux malades

C’est pourquoi une attitude prudente implique de prendre en compte la possibilité d'une sollicitation précoce du système immunitaire. Il est donc recommandé d’éviter autant que possible les situations qui provoquent la stimulation du système immunitaire du porc aux âges où a lieu l’infection par le PCV2.

RECOMMANDATIONS :

==> ré-évaluer le moment approprié des vaccinations ou l’utilisation de produits immuno-stimulants dans un contexte de MAP.

==> retirer les produits vaccinaux ou immuno-stimulants suspects, puisque leur emploi est susceptible de déclencher un problème plus important que celui qui est visé.

Adaptée à la situation française et actualisée par les Drs JB Herin,N. Bridoux et F. Joisel

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