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Cas clinique: Avortements en fin de gestation

Description de l'élevage et apparition du cas
23 Juin 2005
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Description de l'élevage et apparition du cas


Description de l'élevage

Il s'agit d'un élevage qui démarre de zéro avec environ 450 truies et conduite en 3 bandes (60 mises-bas par lot).
Les installations sont bien équipées et les truies ont un très bon état sanitaire: elles sont indemnes de SDRP, d'Aujeszky, d'App, de rhinite et de gale.

On a profité d'un ancien bâtiment d'engraissement pour le transformer en bâtiment de gestantes confirmées avec des truies en liberté.

Les normes de bien-être de l'animal sont largement respectées : les truies disposent de suffisamment d'espace (3,6 m2 par truie, alors que le minimum légal est de 2,25 m2), avec plus de 50% de sol plein. Cette zone est équipée d'un système d'alimentation à distribution lente, avec 6 truies par groupe.

Plan vaccinal:

Aujeszky tous les 4 mois
Parvovirose - Rouget à 14 jours après mise-bas
Colibacillose 3 semaines avant la mise-bas et primipares 6 semaines avant et 3 semaines après
• Cochettes: trivalent (Parvo/Rouget/Aujeszky) 1 mois avant la saillie et revaccination
Autovaccin contre l'épidermite exsudative sur les premiers lots de primipares 4 et 7 semaines avant la mise-bas.

L'élevage a correctement fonctionné jusqu'à présent, malgré les problèmes normaux rencontrés lors des premières mises-bas dans 'un élevage où 100% des truies sont des primipares.

Mois Juin Juillet Août
Nés vivants 11 11,2 11,3
% morts-nés 4,6 8,3 6,1
% mauvaises lactations 7,7 6,5 10,8
nb sevrés 10,2 10,2 10,5

Les truies donnent naissance et sèvrent beaucoup de porcs, en partie parce qu'elles sont saillies à plus 160 kg et à plus de 9 mois d'âge (système danois).

Même sans déclencher les mises-bas, le nombre de mort-nés est très bas, ce qui pourrait être en rapport avec le fait que les truies sont en liberté et donc se "dépensent", ce qui tonifie la musculature abdominale.

Apparition du cas

Le 28 août nous faisons une visite de routine de l'élevage et on nous signale que deux truies ont avorté.

Nous disposons de sérologies récentes de porcelets qui nous indiquent qu'apparemment l'élevage est toujours indemne d'Aujeszky et de SDRP. Nous vérifions la température rectale des truies ayant avorté et elles ne montrent pas de fièvre. Nous pensons qu'il s'agit d'avortements accidentels et nous ne donnons pas d’importance à cette affaire.

Le jour suivant, on nous appelle d'urgence parce qu'une autre truie a avorté. Nous prélevons à nouveau des échantillons de sang sur des porcelets et des truies à différents stades de gestation. Le jour suivant une truie avorte à nouveau. Les deux truies ne montraient pas d'augmentation de température.

Date avortement Date saillie Avortement à J:
27 août 01 juin 87
28 août 27 juin 62
29 août 07 juillet 53
30 août 01 juin 90

Les avortements se situent vers la fin de gestation, 2 correspondent à une bande (en rouge) et les 2 autres à la bande suivante (en bleu).



Résultats d'analyses et évolution du cas


Résultats d'analyses

Puisque les analyses des porcs dont nous disposions indiquaient que l'élevage continuait à être indemne de SDRP et d'Aujeszky, nous suspections qu'il puisse y avoir un problème quelconque avec la vaccination Parvo et Rouget. Nous nous demandons si les 2 vaccinations sur les cochettes ont bien été suffisantes.

Sur les nouvelles analyses que nous réalisons, nous demandons des recherches SDRP, Aujeszky, Parvo et Rouget sur les truies et SDRP et Aujeszky sur les porcs. On prélève des porcs de tous âges (1/4/7 semaines de vie).

Le 5 septembre nous recevons les résultats : l'élevage est toujours indemne de SDRP et d'Aujeszky et les truies sont bien vaccinées Parvo et Rouget. Le 7 septembre une truie saillie le 20 mai, âgée de 110 jours met bas prématurément avec uniquement des mort-nés.

Evolution du cas

Nous passons une semaine plus ou moins tranquilles, mais à partir du 13 septembre nous avons à nouveau des avortements :

Date avortement Date saillie Avortement à J:
13 septembre 03 juin 102
14 septembre 03 juin 103
18 septembre 26 juillet 54
20 septembre 03 juin 109

Il s'agit toujours d'avortements en fin de gestation et la majorité du même lot (rouge). Les truies n'ont pas de fièvre mais nous notons une certaine perte de masse corporelle.

Les mises-bas commencent et au début de lot, nous nous trouvons face à des porcelets petits, peu viables et avec des cas de splay-leg (jusqu'alors pratiquement inexistants). Globalement, nous notons que ces truies arrivent trop justes en condition corporelle.
Le 20 septembre nous avons à nouveau une mise-bas prématurée d'une truie de 109 jours avec 9 nés-vivants très peu viables et 7 mort-nés.

Nous prélevons du sang sur les truies ayant avorté et nous envoyons aussi des fœtus afin d'avoir un examen complet. On ne parvient à isoler aucun agent pathogène.

Vers la fin du lot la situation est de nouveau normalisée, les avortements cessent et les nouveau-nés se portent bien.

Sur les 9 truies ayant avorté ou avec des mises-bas prématurées, 7 sont issues du même lot et les premières truies ayant mis-bas des porcelets faibles correspondent aussi au même lot de production.

S'il s'agit d'un problème infectieux, nous ne comprenons pas pourquoi il affecte majoritairement les truies d'un même lot. Les truies ayant avorté se trouvent dans la même zone de gestantes, mais cela est logique puisqu'elles sont issues du même lot.


Origine possible du cas (hypothèses)


Puisque nous n'identifions aucun pathogène et que les truies ayant avorté n'ont pas de fièvre, nous commençons à penser que le problème ne doit pas être de type infectieux.

Étant donné que les truies les plus litigieuses du lot (celles ayant avorté et celles avec des porcelets faibles) avaient une condition corporelle insuffisante, nous pensons qu'il pourrait y avoir un problème de concurrence alimentaire dans les cases.

Les mois précédents, nous avions déjà remarqué ponctuellement des truies qui n'avaient pas accès à l'aliment parce qu'elles étaient "intimidées" par les dominantes ou parce que quelques doseurs étaient obstrués (par exemple par de l’aliment colmaté). Le problème se résolvait en séparant les truies attardées dans une case avec un système d'alimentation à volonté.

Quand les avortements ont commencé, nous avons revu à nouveau le système d'alimentation et nous n'avons observé aucun doseur obstrué. En principe l’aliment descend normalement. En outre, nous pensons que si une truie avorte par manque d'aliment, il doit s'agir d'une situation réellement extrême et les truies ayant avorté n'avaient pas une condition corporelle aussi mauvaise que cela le serait dans ce cas.

L'élevage retrouve peu à peu une situation normale, il n'y a pas d'autres avortements ni de porcelets faibles. Nous ne comprenons toujours pas ce qu'il s'est passé.


Résolution du cas et explication


Résolution du cas

Au bout de quelque temps, nous observons que les truies à 35 jours de gestation qui ont été transférées dans la zone de gestantes confirmées où l'on avait placé le lot à problème, se montrent nerveuses au moment du repas et nous devons isoler quelques truies parce que leur condition corporelle diminue considérablement.

Chaque case dispose de 6 doseurs à distribution lente, avec un espace disponible pour manger de 0,58 m par truie avec des semi-séparateurs entre elles.

Ces doseurs fonctionnent à l'aide d'un petit moteur électrique qui offre plus ou moins grand dosage en fonction de la dose demandée à l'unité de contrôle correspondante.

Dans ce cas une unité contrôle 5 cases (30 truies). Le système est en principe adéquat, puisque les bandes de l'élevage sont de 60 truies (conduite en 3 bandes) et puisque les besoins nutritionnels du lot tout au long de la gestation confirmée seront très semblables d'une case à l'autre

On avait déjà vérifié que tous les doseurs distribuaient bien l’aliment ainsi que le temps d'administration. Par contre, on n'avait pas contrôlé la quantité d'aliment fournie par le doseur.

Nous posons un sac attaché à un doseur et mettons le système en marche. Nous nous apercevons qu'au lieu de distribuer 3 kg de ration, il est en réalité distribué seulement 1 kg. Cela se produit dans les 5 cases régulées par la même unité de contrôle.

Explication

Chaque unité de contrôle a un transformateur pour que le courant qui arrive à 220 volts soit réduit à 12 volts. Une défaillance dans l'un de ces transformateurs fait que la tension fournie est seulement de 4,5 volts, c'est pourquoi le moteur des doseurs fonctionne plus lentement et ainsi la dose fournie est considérablement réduite.

Le stress constant d'un groupe de 30 truies avec une réduction très importante de la ration a provoqué l'avortement de certaines. Nous pensons que la cause de l'avortement est plus liée au stress qu'à la perte de la condition corporelle étant donné que celle-ci n’était pas si excessive que cela.

Un autre fait a été aussi remarqué sur les mises-bas: à cause de la malnutrition en fin de gestation (quand le fœtus se développe le plus), les porcelets nés ont été beaucoup plus petits et faibles et les cas de splay-leg ont augmenté.


Commentaires

Dans cet élevage, un ancien engraissement a été récupéré pour être transformé en bâtiment de gestantes confirmées. Il s'agit d'un engraissement peu conventionnel, type "nid". La zone intérieure est totalement couverte et sans caillebotis; la zone extérieure est ouverte avec caillebotis et un simple toit de fibrociment avec du polyuréthane injecté. L'auge se trouve à l'intérieur, l'abreuvoir à l'extérieur.

Cette installation d’engraissement n’est pas une merveille et présente beaucoup d'inconvénients:

•En été les porcs se reposent à l'extérieur et défèquent généralement à l'intérieur (où il n’y a pas de caillebotis).
•En hiver il s'agit d'une installation extrêmement froide et il n'y a aucune possibilité de placer un chauffage.
•La surveillance quotidienne des animaux requiert du temps, puisqu'il est nécessaire d'entrer dans chaque case pour inspecter les porcs qui sont à l'intérieur.

Sur la transformation de l'engraissement en cases collectives de truies

Malgré ses aspects négatifs, l'installation est en bon état et il est décidé d’en profiter pour loger les truies gestantes en groupe.

Le principal problème en logeant des truies en groupe est de trouver un système d'alimentation efficace.

Si on veut maintenir le système de mangeoires d’origine, il n’est pas possible de réguler l'ingestion des truies, elles vont trop grossir, des problèmes en maternité vont survenir et les frais d'alimentation vont augmenter.
Afin de pouvoir rationner tout en garantissant une ingestion minimale de toutes les truies du groupe, il a don été décidé d'installer un système d'alimentation à distribution lente avec doseurs.

• Chaque truie dispose d'un doseur et de semi-séparateurs de 0,58 m qui délimitent l'espace du repas.
• Entre la partie intérieure et l'extérieur les truies disposent davantage d'espace (3,6 m2 par truie) et de plus de 50% de sol plein.

Concernant le système de distribution lente

Les doseurs fonctionnent à l'aide un petit dispositif électronique réglant un moteur électrique qui fait que l'aliment tombe peu à peu, lentement.
Un groupe de doseurs est relié à une unité de contrôle qui détermine la quantité à distribuer.

Les différentes unités de contrôle sont reliées à un programmateur qui mettra en marche les doseurs automatiquement. Dans ce programmateur, nous pouvons mémoriser 8 dosages différents, en spécifiant la quantité d'aliment, le temps de distribution, le nombre de repas quotidiens et le temps entre les repas.

On aurait pu placer une unité de contrôle par case, mais, dans ce cas précis, nous avons une unité pour 5 cases (30 truies). Ainsi on réduit les coûts, mais dans ces 5 cases la dose administrée devra être la même pour les 30 truies. Puisque les bandes de l'élevage sont de 60 truies (conduite 3 semaines) et puisque les besoins du lot en gestante confirmée sont très semblables, le système est bien adapté.

Dans ce cas, la nouveauté de l'installation et le peu d'expérience du système ont entraîné l'apparition d'avortements et la naissance de porcelets faibles parmi quelques lots de truies gérés par la même unité de contrôle.

Le problème se trouvait dans le transformateur qui alimente l'unité de contrôle. Une défaillance électrique fournissant moins de volts que nécessaire, faisait que le moteur électrique du doseur fonctionnait à plus petite vitesse, réduisant considérablement la ration. L'unité de contrôle nous induisait en erreur puisque nous pensions que nous fournissions 3 kg, alors qu'en réalité on ne donnait seulement pas plus d'1 kg.

Le problème a été résolu et aujourd'hui le système fonctionne de manière efficace, malgré les inconvénients que pose tout système d'alimentation de truies en groupe.

Le vétérinaire doit donc aussi s’intéresser de près au fonctionnement des appareils automatiques et ne pas se fier uniquement à leurs réglages ; il vaut mieux mesurer soi-même si les réglages programmés produisent les actions attendues. L’électronique a ses limites!!!

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