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Cas clinique: Maladie de Talfan

Description de l'élevage et apparition du cas
4 Novembre 2004
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Description de l'élevage et apparition du cas

Description de l'élevage:

Il s'agit d'un élevage de 250 truies, naisseur-engraisseur, situé en Bretagne. La conduite est en 3 semaines et le sevrage à 28 jours.
L'élevage renouvelle par achat de cochettes.
L'éleveur prélève ses verrats.
L'aliment est fabriqué à la ferme.

Plan de masse :





Prophylaxie:

Le statut de l'élevage est indemne vis-à-vis de l'Aujeszky. Il y a des antécédents de SDRP et de MAP.

Les vaccinations pratiquées sont les suivantes:

Truies Aujeszky
Grippe
Parvovirose
Rouget
Colibacillose néonatale
Rhinite atrophique
Porcelets Mycoplasme
Aujeszky

Apparition du cas (J 0)


Une visite est programmée quelques jours plus tard. Dans l'intervalle, un 2ème porcelet est amené au labo.

Résultats des premiers examens:

Le porcelet dernièrement reçu présente les mêmes symptômes et des lésions macroscopiques de méningite.

Sue l'ensemble des examens, les analyses bactériologiques sont sans résultat au niveau des méninges, du liquide céphalo-rachidien, des ganglions mésentériques et des articulations. Les recherches de Streptococcus suis et d'Haemophilus parasuis en particulier ne donnent rien.

Des prélèvements de cerveau et de moëlle épinière sont adressés pour histologie.

Visite de l'élevage et premières mesures prises

Visite de l'exploitation


Secteur naissage :

RAS, pas de problème de reproduction (90% de fécondité), pas d'avortement ; le nombre de sevrés par truie (plus de 11) est plutôt en augmentation; l'aspect des truies et des porcelets en maternité est bon, il n'y a pas de symptômes.

En post-sevrage :

· post-sevrage bien entretenu, caillebotis intégral, nourrisseur
· aliment 1er âge supplémenté colistine et chlortétracycline ; 2ème âge " blanc "
· eau traitée avec des péroxydes : le test bandelette montre que la dose est trop faible
· les porcelets sont 28 à 30 par case (chargement un peu élevé)
· autant que possible les portées ne sont pas défaites au sevrage
· l'éleveur signale des passages de diarrhées d'allure colibacillaire à la transition 1er-2ème âge
· dans les salles où se trouvent les porcelets sevrés depuis 5 semaines, il y a eu 6 cas " neurologiques " dont 3 dans une même case ; un porcelet de très bel aspect, très vigile, présente une parésie du train postérieur
· l'aspect de l'aliment est normal ; il n'y a pas eu de changement de fournisseur de CMV
· il n'y eu aucun traitement des animaux, pas de traitement raticide ou insecticide des locaux

En engraissement:
L'éleveur n'est plus capable de retrouver les animaux de la précédente bande qui ont présenté des symptômes car rien ne les distingue des autres ; quelques toux sur les animaux de 80 kg ; pas de mortalités inhabituelles, pas de boîteries, pas de refus d'aliment ; le problème de MAP a fortement régressé

Dans l'infirmerie: 3 animaux se " refont ", l'un d'eux présentant encore des troubles nets de l'appui sur les postérieurs ; l'autopsie sur place d'un sujet de l'infirmerie mort ce jour montre des lésions d'entérite colibacillaire (suite à sa fragilité initiale ?)

Mesures prises dans l'élevage en l'attente du résultat du laboratoire :

L'éleveur procédant déjà à l'isolement des animaux atteints, je propose simplement de faire un apport de vitamine E sélénium dans l'eau de boisson pour améliorer la réponse immunitaire.

Bien qu'on ne s'oriente pas vers une cause bactérienne des symptômes neurologiques, l'injection ampicilline et colistine avec anti-inflammatoire le 1er jour peut être utile pour soulager les animaux et prévenir les surinfections sur animaux fragiles.

Résultats définitifs, diagnostic, mesures prises et évolution

Résultats des analyses histologiques :


Moelle épinière: poliomyélite non suppurée
Cerveau: encéphalite non suppurée avec manchons périvasculaires et nodules gliaux
Photos Service d' histopathologie E.N.V.N.

L'histologiste conclue : lésions de polyomyélite et d'encéphalite compatibles avec l'hypothèse virale type Talfan

Diagnostic:

Troubles neurologiques d'origine virale probablement de type Entérovirus Talfan.
Vu le contexte économique défavorable et vu la courte durée de l'épisode pathologique, nous n'avons pas investi dans des analyses virologiques pour confirmer définitivement le diagnostic

Protocole mis en place

  • Isolement des malades.
  • Elimination des sujets qui ont des séquelles.
  • Double désinfection , la première avec Aseptol 2000™ (glutaraldéhyde + ammoniums quaternaires) que l'éleveur utilise habituellement, la 2ème avec Alviral™ (troclosène) pour une deuxième action virucide.
  • Repérage des mères à risque si le phénomène se poursuit.

    Un travail de fond est à entreprendre sur un meilleur respect des normes zootechniques (pour la prévention colibacillose).

    Résultats obtenus et évolution du cas


    Pas de nouveau cas d'allure neurologique 15 jours après la visite d'élevage.
    Par contre, les cas de colibacillose sont plus fréquents mais l'éleveur qui a le sentiment de bien les maîtriser, considère qu'il est revenu à une pathologie beaucoup plus " classique ".

    Commentaire

    Il est rare d'observer un cas de Maladie de Talfan; je pourrais faire les remarques suivantes sur le déroulement de ce cas.

    Apparition du cas

    L'éleveur n'a pas réagi tout de suite car il était " habitué " à quelques cas de méningite à streptocoques. De plus, le nombre de cas était faible et il n'y avait pas de mortalité.
    C'est l'attitude des porcs qui l'a intriguée et l'a incité à apporter un sujet au laboratoire.
    L'apparition ne semble pas liée à un phénomène déstabilisant dans l'élevage (pas plus d'entrée de cochettes notamment, pas de symptômes pouvant laisser penser qu'on a un passage de SDRP concomitant).

    Visite de l'exploitation

    Suite à la première autopsie, je ne m'orientais plus vers une hypothèse bactérienne (pas de lésions, pas d'isolement) et j'ai plutôt questionné et observé pour éliminer certaines pistes.
    L'absence de pathologie de la reproduction (notamment avortements), l'absence de mortalités de porcelets ou signes nerveux sous la mère, le relatif calme respiratoire en engraissement, la bonne forme des chiens de l'élevage ainsi que l'aspect des porcelets malades m'ont rassuré quant à une résurgence d'Aujeszky, phénomène qui bien que très peu probable reste toujours présent à notre esprit dans la région.
    L'absence de produits potentiellement toxiques, le faible nombre d'animaux atteints, la forte hyperthermie, les symptômes peu évocateurs, n'étaient pas très en faveur d'une intoxication. L'influence mycotoxines semblait également peu probable (pas de symptômes sur les porcelets plus jeunes, mycotoxines à effet neurotoxique peu décrites chez le porc).
    Je me suis posée la question d'une carence en vitamine E-sélénium ou syndrome de stress à cause de la démarche raide de certains sujets, l'hyperthermie pouvant peut-être s'expliquer, mais il n'y avait pas de mort cardiaque et pas de lésions.
    Restait pour moi l'hypothèse virale. Une forme nerveuse de SDRP ? Mais outre la rareté, il semblait étonnant qu'on n'ait pas de lésions respiratoires associées. L'allure des porcs " pattes en arrière " qui restait dans ma tête comme un vieux souvenir d'école, le peu de mortalité et le rétablissement de la plupart des sujets pouvaient évoquer la Maladie de Talfan dont on connaît le côté sporadique, même si l'âge d'apparition des symptômes était un peu tardif par rapport à ce qui est décrit dans la bibliographie. Le fait d'avoir plusieurs cas dans une même case semble signer une moindre protection conférée par certaines mères ou une contagion par grande proximité. J'excluais la forme Teschen qui a priori n'est pas présent en France et qui occasionne beaucoup de mortalité.

    Mesures prises

    L'éleveur avait déjà pris la mesure la plus judicieuse, à savoir l'isolement des porcelets atteints en infirmerie. Toutefois, il avait remis en engraissement les premiers sujets atteints et guéris.
    L'intervention avec vitamine E et sélénium avait pour but de ne pas passer à côté d'une éventuelle erreur de prémix et également de "doper " le système immunitaire et musculaire pour éviter de nouveaux cas.
    Je ne contrarie pas l'éleveur dans l'utilisation Ampi-Colistine-Dexaméthasone, qui a le mérite de limiter les surinfections et qui soulage l'inflammation des méninges.
    Je préconise un renforcement de la désinfection dans la mesure où s'il s'agit de Talfan, on a affaire à un virus très résistant.

    Evolution du cas

    Rentré dans l'ordre très vite, le problème s'est limité à 3 bandes soit 9 semaines. Ceci peut s'expliquer par la forte immunité qui s'établit suite au contact avec ce type de virus. Les éleveurs ne prenant pas de précautions particulières entre les différents secteurs de l'élevage, il est probable que les truies éventuellement "naïves " ont été au contact de l'agent pathogène présent en grande quantité du fait de l'expression clinique.
    On a parallèlement un retour de colibacilloses typiques à la transition alimentaire.
    Il n'est pas impossible que les efforts faits pour juguler la MAP avec notamment la limitation des mélanges d'animaux à tous les stades de l'élevage aient occasionné une immunisation plus lente du cheptel vis-à-vis d'autres germes.

  • Commentaires de l'article

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