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Cas clinique: Des cochettes "trop" saines ?

Ce cas dans un élevage naisseur post-sevreur de 1200 truies dans une zone à forte densité porcine montre bien la difficulté à introduire des animaux très sains dans un cheptel au sanitaire chargé.

11 Mars 2010
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Description de l’élevage, statut sanitaire, appel de l’éleveur


Il s’agit d’un élevage naisseur post-sevreur de 1200 truies dans une zone à forte densité porcine.
Conduite en 20 bandes, sevrage à 21 jours.
L’éleveur produit lui-même ses cochettes à partir de truies grand-parentales introduites à 8 kg.
Toutes les doses d’IA sont achetées à l’extérieur.
L’aliment est fabriqué à la ferme.

Statut sanitaire de l’élevage

Maladie
Statut
Vaccination truies
Vaccination issues
SDRP Positif avec relance récente Modification récente avec passage au vaccin vivant Non vacciné
Mycoplasme Positif Non vacciné Vacciné
Actinobacillus pleuropneumoniae Positif en App2 avec de la clinique dans certains sites d’engraissement Autovaccin sur les cochettes en engraissement Non vacciné
PCV2 Pas de clinique Non vacciné Non vacciné
E coli Pas de clinique Vacciné Non vacciné
Parvovirose - Rouget Pas de clinique Vacciné Non vacciné
Rhinite atrophique Pas de clinique Vacciné Non vacciné

Appel de l’éleveur

L’éleveur a changé il y quelques mois l’origine des cochettes grand-parentales introduites à 8 kg. Ces animaux sont donc suivis avec une attention toute particulière et les premières qui arrivent en maternité n’expriment pas la prolificité attendue. La fertilité a été correcte mais le nombre de petites portées (< ou = 8 Nés Totaux) est de plus de 15% avec des portées décrochant carrément entre 4 et 6 Nés Totaux.



Visite de l’élevage


Le programme d’introduction et d’élevage des cochettes grand-parentales a été élaboré et suivi en parfaite concertation.

Le statut sanitaire des cochettes introduites est connu : elles sont indemnes de SDRP, de mycoplasme et bien sur d’Actinobacillus et de Rhinite atrophique. De plus elles proviennent d’un élevage récent et sont donc issues de cochettes.
Toutes les précautions ont été prises pour leur introduction : elles sont réceptionnées dans un caisson étanche où elles sont vaccinées Mycoplasme et SDRP avant d’être mise en contact progressivement avec des porcelets de l’élevage.

Après 8 semaines elles passent dans une salle d’engraissement spécifique. Les cochettes nées sur l’élevage et passées dans le post-sevrage de l’élevage sont élevées dans une salle contigüe.

Toute cette phase d’introduction et d’élevage a été suivie attentivement et les animaux n’ont exprimé aucun signe de pathologie et ont eu une croissance harmonieuse.

Le programme de vaccination et d’adaptation dans la quarantaine a été parfaitement respecté et les animaux n’ont présenté aucun signe clinique ni comportement anormal lors de leur introduction dans le cheptel ou à la saillie.
La semence utilisée sur ces animaux n’étant pas la même que celle utilisée pour inséminer les cochettes parentales, nous avons vérifié sa provenance, ses conditions de transport, de conservation et d’utilisation sans identifier de facteur de risque à ce niveau la.

La seule chose remarquable a posteriori est un passage de SDRP identifié sur l’ensemble de l’élevage 3-4 mois auparavant donc sensiblement au moment des saillies de ces animaux. Cet épisode avait entraîné la mise en place d’un programme vaccinal sur le cheptel truie avec vaccin vivant.

Conclusion de la visite

En l’absence d’autre symptôme sur ces animaux et après avoir vérifié tous les paramètres zootechniques concernant leur mise à la reproduction et leur saillie, la suspicion a porté sur un impact plus fort du SDRP sur ces animaux à moindre immunité.
Le protocole vaccinal étant en place depuis peu et la vérification de la suspicion étant impossible à ce stade, nous avons donc décidé avec l’éleveur de garder ces animaux sous surveillance et de refaire un point 3 mois plus tard.



3 mois plus tard


La situation est restée identique.

Il est donc décidé de réaliser des investigations complémentaires afin de déterminer ce qui entraîne ces pertes embryonnaires sur une population spécifique de l’élevage.

Cliniquement il n’y a toujours rien de visible sur ces animaux.
Par contre les premières arrivent maintenant en 2ème portée et donnent des résultats de prolificité tout à fait satisfaisants, même celles qui n’avaient fait que quelques porcelets en première portée.

Nous décidons donc de réaliser un profil sérologique qui encadre l’entrée et la saillie de ces animaux en couvrant les pathologies connues de l’élevage et d’autres éléments pouvant entraîner des pertes embryonnaires. Les prélèvements sont réalisés sur 5 bandes de cochettes (5 par bandes) :

· En fin d’engraissement
· En sortie de quarantaine
· A la saillie
· 5 semaines après saillie
· 8 semaines après saillie

Les recherches réalisées sont les suivantes :

· SDRP en PCR
· Grippes en sérologie
· Parvovirus en sérologie
· Coronavirus en sérologie
· Mycoplasme en sérologie
· Actinobacillus 2 et 9 en sérologie

Résultats

- SDRP : Tous les résultats PCR sont négatifs. On peut donc considérer qu’il n’y a pas ou peu de circulation au moment des prélèvements.

- Grippe : Les sérologies ont montré qu’il y avait eu un passage de HSW1N1 en cours d’engraissement, sans changement de statut autour de la saillie.

- Parvovirose : Pas de signe de circulation, avec des titres parfaitement compatibles avec la vaccination en place.


- Coronavirus : très peu de positifs en fin d’engraissement ou en sortie de quarantaine. Par contre, 5 semaines après saillie tout le monde est positif.


Comme ce n’est plus le cas sur les cochettes prélevées 8 semaines après saillie, on peut se demander s’il s’agit d’un phénomène ponctuel ?

- Mycoplasme : Tout est positif en fin d’engraissement et 5 semaines après saillie. Par contre on a un statut variable, négatif, douteux ou positif sur les animaux en fin de quarantaine ou à la saillie.


- Actinobacillus : pour le 9, tous les prélèvements sont négatifs. Par contre pour le 2 on voit très nettement un changement de statut entre la fin d’engraissement et 5 semaines après saillie.



Les animaux sont ici vaccinés avec un auto vaccin Actino 2 en fin d’engraissement. Il peut donc s’agir d’une séroconversion vaccinale, bien qu’elle paraisse un peu tardive.


Interprétation, mesures préconisées et évolution


Interprétation et mesures préconisées

Les analyses ont permis d’éliminer SDRP, grippe et parvovirus du nombre des suspects.

S’il n’est pas facile de statuer définitivement sur un coupable à désigner, on peut cependant considérer qu’on a pour ces animaux une période de risque importante entre la sortie de quarantaine et 5 semaines après la saillie vis-à-vis d’au moins 3 contaminants respiratoires qui sans entraîner de signes cliniques marqué peuvent faire augmenter la température suffisamment pour entraîner des mortalités embryonnaires pendant la phase de nidation.

Les mesures préconisées comprenaient donc :

- Un espacement des sorties de quarantaine, pour ne ramener des animaux « sensibles » que toutes les 6 semaines dans la verraterie.
- La mise en place d’un rappel de vaccination mycoplasme au moment du testage des cochettes vers 150 jours d’âge.
- Une modification du programme d’utilisation de l’autovaccin Actino afin d’assurer un délai suffisant entre la deuxième injection et la sortie de quarantaine pour tous les animaux.

Par ailleurs, l’éleveur a de lui-même modifier son programme de mise en contact avec des truies adultes en installant une case pour une truie dans les salles d’engraissement cochettes grand-parentale. Une truie sevrée y est installée et changée toutes les semaines pendant les 4 dernières semaines d’engraissement.

Evolution de la situation

Les premières bandes qui ont suivi le nouveau protocole ont retrouvé la prolificité attendue avec un nombre de petites portées raisonnables (5%) et la situation semble stable.

Conclusion

L’évolution favorable de la situation et sa stabilisation confirment la validité des mesures correctives mises en place.

Le temps disponible pour préparer les cochettes à leur introduction dans le cheptel est mieux utilisé et la santé des truies grand-parentales introduites dans le cheptel est préservée.

La circulation des contaminants, en particulier respiratoires, dans le bloc verraterie devrait s’en trouver limitée et l’ensemble du cheptel va en profiter.


Commentaires

Ce cas montre bien la difficulté à introduire des animaux très sains dans un cheptel au sanitaire chargé. Il est cependant possible de trouver des solutions efficaces et raisonnables.

Ici, le programme d’introduction qui visait à protéger les cochettes du microbisme de l’élevage pendant leur phase d’engraissement a ‘’trop’’ bien fonctionné. Le mycoplasme ne semble pas avoir circulé pendant cette phase laissant les animaux sans défense lorsque la protection vaccinale arrive en bout de course.

Les cochettes n’avaient pas non plus acquis d’immunité vis-à-vis de l’actinobacillus de l’élevage en engraissement. Par contre la séroconversion massive autour de la saillie est très nette.

La tentation de désigner un ‘’coupable’’ unique et de fournir une réponse simple nous a retardés de plusieurs mois dans l’établissement du diagnostic. La suspicion de SDRP aurait pu être écartée plus vite en réalisant les analyses PCR lors de la première visite.

L’association de malfaiteurs en œuvre ici n’avait a priori rien à voir avec la reproduction mais tout à voir avec l’état de santé des cochettes au moment de leur mise à la reproduction. C’est un aspect qu’on a souvent tendance à négliger de prime abord.

La réalisation d’un profil sérologique large autour de la phase à risque nous a cependant permis de mettre en évidence plusieurs cibles.

Dans les mesures mises en place, les interventions vaccinales visent des cibles précises (mycoplasme et actinobacillus). La gestion de la mise en contact avec les truies de réforme et l’espacement des introductions de cochettes en verraterie ont également une part importante dans la gestion de contaminants qui n’auraient pas clairement été identifiés ici.

Outre les aspects spécifiques concernant la gestion des cochettes, ce cas nous montre également que dans des problèmes touchant la reproduction il nous faut élargir la réflexion et que le ‘’complexe respiratoire’’ qui fait tant de dégâts économiques en engraissement peut également intervenir sur les résultats de reproduction.

Dr Mireille MAUSSERVEY
Vétérinaire
22 - LOUDEAC

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