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Cas clinique: Eradication du SDRP sans vider l'élevage

Description de l'élevage et appel de l'éleveur
30 Avril 2004
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Description de l'élevage et appel de l'éleveur


Description générale de l'élevage et de sa situation sanitaire:

Il s'agit d'un élevage de 200 truies composé de deux sites:

- un site de naissage avec 690 places de post-sevrage

- un site pour l'engraissement situé à 13 kms

L'exploitation est située dans une zone à moyenne densité porcine dans le grand Ouest de la France.

L'élevage achète ses cochettes à l'extérieur ainsi que les doses d'insémination.
La conduite est en 7 bandes et le sevrage a lieu à 28 jours.

Un couple d'éleveurs s'occupe du naissage et un autre de l'engraissement, il n'y pas de croisement de personnel entre les deux sites.

Statut sanitaire :


SDRP positif depuis 1995, élevage instable actif
Actinobacillus pleuropneumoniae:
positif, signes cliniques en engraissement
Maladie d'Aujeszky négatif
Mycoplasma hyopneumoniae positif, signes cliniques en engraissement
Streptocoque suis 2 positif, signes cliniques en post-sevrage et engraissement
E. coli K88 et K82 positif, signes cliniques en post-sevrage


Prophylaxies effectuées :

  • E coli K88, K 99, 987P (truies et cochettes)
  • Clostridium perfringens type C et type A (truies et cochettes)
  • Parvovirose (truies et cochettes)
  • Rouget (truies et cochettes)
  • Maladie d'Aujeszky (truies, cochettes et issues)
  • SDRP inactivé (truies et cochettes) depuis 3 ans
  • Mycoplasme 2 doses (issues)

    Appel de l'éleveur

    En 2001, l'éleveur nous appelle pour nous faire part de sa grande lassitude et sa difficulté à gérer au quotidien son élevage :

    - fertilité satisfaisante et prolificité très correcte,

    - Soucis importants en maternité sur les porcelets se traduisant par mortinatalité, saignements de cordons, porcelets chétifs, pertes importantes sur nés vivants (>20%)

    - Soucis importants en maternité sur les truies se traduisant par un appétit très capricieux, des mises-bas avant terme, des agalacties, des mises bas très longues, des montées en température,

    - Pathologies importantes en post-sevrage et en engraissement avec des frais vétérinaires élevés (206 euros par truie et par an en 2001)




    Visite de l'élevage et examens complémentaires


    Visite de l'élevage et recueil des commémoratifs

    Depuis toujours, cet élevage est parfaitement tenu.

    Quarantaine sur paille


    Réception de 10 cochettes toutes les 6 semaines.

    Les cochettes proviennent du même département que l'exploitation et possèdent un niveau sanitaire mal connu : seul le statut indemne SDRP et Aujeszky est assuré à l'heure actuelle et depuis environ 1 an.
      - Le protocole de vaccination est tout à fait conforme (cf. précédemment pour le détail)
      - contamination par apport de délivres fraîches et hachées et de déjections de truies après mise-bas 1 à deux fois avant la mise à la reproduction
    En quarantaine, le comportement des cochettes est bon, aucune symptomatologie particulière n'est observée.

    Verraterie-Gestantes

    Notons que les cochettes entrent dans le bâtiment verraterie 3 semaines environ avant la date présumée d'IA.
    L'état d'engraissement est correct pour l'ensemble du cheptel, les peaux sont propres.
    Les truies sont alimentées à la soupe, l'hygiène de l'alimentation est parfaite.

    Le dernier contrôle urinaire est bon : moins de 10 % d'urines troubles et/ou nitrites + sur 50 urines prélevées dans le dernier tiers de la gestation.
    On ne remarque pas de décharges vulvaires à l'IA. Le bâtiment est très bien tenu.

    Par contre, il y a des vagues régulières de toux sur le cheptel truie et les cochettes à l'arrivée dans cette salle suivies quelques jours après par des avortements, des anorexies.

    Là aussi le protocole de vaccination est conforme, les truies sont vaccinées à chaque cycle contre le SDRP 9 à 10 semaines avant mise-bas.

    Maternité

    Nous ne faisons que constater les éléments ayant alerté l'éleveur (rappel : soucis importants en maternité sur les truies se traduisant par un appétit très capricieux, des mises-bas avant terme, des agalacties, des mises bas très longues, des montées en température): tous les symptômes évoqués dans la présentation du cas sont vérifiés.

    Les salles de maternité sont parfaitement tenues. Rien n'est à redire sur le travail des éleveurs.


    Post-sevrage

    Les porcelets reçoivent pendant 15 jours après sevrage un aliment supplémenté avec colistine (120 ppm), tylosine (300 ppm) et oxybendazole (42 ppm) et ensuite un aliment supplémenté avec tylosine (100 ppm).

    Les porcelets sont très sensibles à la diarrhée ce qui oblige les éleveurs à ces préventions antibiotiques dans l'aliment. De plus, il y a des bandes plus ou moins touchées par des arthrites (jusque parfois 10% d'un lot) et par des passages de toux obligeant les éleveurs à utiliser l'aspirine et parfois là encore des antibiotiques.

    Engraissement

    Il n'a pas été visité car l'associé qui s'occupe de ce site ne le souhaitait pas. D'une manière générale, les éleveurs ont cité des problèmes pathologiques d'ordre digestif là encore avec parfois des passages respiratoires.

    Examens complémentaires réalisés le jour de la visite et résultats

    Etant donné la symptomatologie très évocatrice et vu l'historique de l'élevage, nous réalisons le jour de la visite un profil sérologique SDRP (test IDDEX). Les résultats sérologiques individuels sont présentés dans le tableau ci dessous :

    RANG
    Titre
    Interprétation
    0
    0
    Nég
    0
    0,06
    Nég
    0
    0
    Nég
    0
    0,05
    Nég
    0
    0,14
    Nég
    1
    1,51
    Pos
    1
    1,51
    Pos
    1
    1,68
    Pos
    1
    1,11
    Pos
    2
    0,76
    Pos
    2
    0,29
    Nég
    2
    0,36
    Nég
    2
    0,94
    Pos
    3
    0,1
    Nég
    3
    1
    Pos
    3
    0,12
    Nég
    3
    1,16
    Pos
    5
    0,86
    Pos
    5
    0,57
    Pos
    5
    0,24
    Nég
    5
    0,3
    Nég
    6
    0,45
    Pos
    7
    0,52
    Pos
    8
    0,17
    Nég



    Mesures prises


    Interprétation des résultats et prise de décision

    La symptomatologie et les résultats du profil sérologique confirment plusieurs choses :
      · A l'heure actuelle, les cochettes semblent bien provenir d'un élevage indemne de SDRP
      · La contamination a lieu surtout en maternité et est assez rapide dés le premier cycle reproductif
      · Les titres et les taux de séropositives sont hétérogènes en fonction des rangs de portées
      · Le troupeau est instable et le taux de séropositives est moyen à élevé (50%)
    Dans ce contexte, les éleveurs prennent la décision d'éradiquer le SDRP car leur lassitude face aux relances cliniques continuelles et la difficulté à gérer leur exploitation sont devenues trop importantes. Leur conduite d'élevage n'étant pas remise en cause, la vaccination montrant ses limites, ils ne voient pas d'autres alternatives.

    Mise en place du protocole


    Lorsque la décision d'éradiquer a été prise conjointement avec les éleveurs, il n'y avait pas eu d'entrée de cochettes depuis au moins 3 mois.

    Le cahier des charges de l'éradication a été le suivant :
      - réception de 24 cochettes toutes les 6 semaines
      - L'objectif fixé était en effet de renouveler entièrement le troupeau sur deux rotations, demi-bande par demi-bande (donc 8 mois de co-existence ancien et nouveau cheptel) sans aucun arrêt de production
    La chaîne bâtiment (deux salles de maternité et de PS par bande) le permettait sans croisement de l'ancien et du nouveau cheptel au sein de même salle

    Le choix des futurs reproducteurs

    Le choix des cochettes s'est fait sur la base du respect d'un cahier des charges sanitaire défini au préalable.

    Ainsi, les futurs reproducteurs devaient provenir d'un élevage :

    - indemne de SDRP, de maladie d'Aujeszky et de Peste porcine
    - indemne d'Actinobacillus pleuropneumoniae (sérogroupes 1-9-11 et 2 au minima)
    - indemne de signes cliniques de MAP, de streptococcie et d'entérite hémorragique à Lawsonia intracellularis
    - de statut documenté vis à vis de la rhinite atrophique et de la mycoplasmose respiratoire

    Le programme de vaccination


    En quarantaine, ont été pratiquées les vaccinations contre la mycoplasmose, la rhinite, l'actinobacillose, la maladie d'Aujeszky, la grippe, la parvovirose, le rouget et le SDRP.

    En gestation, des rappels cycliques ont été pratiqués contre le SDRP, la rhinite atrophique, la clostridiose et la colibacillose néonatales, l'Aujeszky, la parvovirose et le rouget sur les cochettes et sur l'ancien cheptel.

    Enfin, les porcelets ont continué à recevoir les vaccins contre la maladie d'Aujeszky et la mycoplasmose.

    L'ensemble de ces vaccinations est indispensable pour limiter les risques de déstabilisation sanitaire liés à un renouvellement aussi massif.

    Programme de contamination

    Pour limiter tout risque potentiel de recontamination interne par le SDRP, aucune contamination volontaire n'a été réalisée sur le troupeau de renouvellement.

    Conduite du nouveau troupeau

    Les cochettes, après leur passage en quarantaine, ont été élevées dans la seule salle gestante à proximité de l'ancien cheptel.
    Demi-bande par demi-bande, tout le troupeau reproducteur a été renouvelé sur deux cycles (soit 8 mois de co-existence ancien et nouveau cheptel).

    Toutes les mesures possibles (nettoyage-désinfection, marche en avant, hygiène des injections et des manipulations, désinsectisation…) ont été prises pour éviter la transmission du SDRP aux cochettes.



    Résultats et évolution


    Evolution de la symptomatologie

    L'évolution de la clinique au cours du renouvellement a été relativement spectaculaire dans la mesure où les symptômes récurrents perduraient sur les salles de mise-bas de l'ancien cheptel et ont stoppé net dés les mises-bas du nouveau troupeau.

    A ce jour, depuis la fin du renouvellement, aucun symptôme évocateur du SDRP n'a été observé.

    Dépistage total et conclusion

    En octobre 2002, les 185 cochettes et primipares du nouveau cheptel ont été prélevées (prélèvement sanguin sur tube sec) individuellement ainsi que 30 issues de 70 jours d'âge.
    Seules 3 reproductrices se sont révélées positives (ELISA SDRP, kit IDDEX) lors de ce contrôle et les 30 issues étaient négatives. Même s'il est fort peu probable que la positivité soit liée à une infection active, elles ont été éliminées.

    En mai 2003, 91 animaux adultes ont été recontrolés ; 2 sérums ont été testés positifs mais avec des taux e/p<0,48.
    En l'absence de symptomatologie évocatrice, ces animaux ont été considérés comme faux positifs (en terme de séroconversion suite à une infection par du virus sauvage).

    Dans ce contexte, nous concluons à l'éradication du SDRP sur le site de naissage.

    En engraissement, la marche en avant et les différentes mesures hygiéniques n'ont pas pu être mises en place. La circulation est toujours présente même si la séroconversion est plus tardive.

    Evolution technique et économique


    Dans le tableau ci dessous, les gains liés aux économies alimentaires et de santé sont présentés ainsi que le surcoût lié à l'augmentation du renouvellement sur deux rotations.

    IC Global
    - 0,037 €/kg carcasse
    Dépenses de santé
    - 0,0455 €/kg carcasse
    Renouvellement
    + 0,0055 €/kg carcasse
    Somme des gains/surcoût (économie)
    - 0,077 €/kg carcasse

    Ainsi, dés la première année ayant suivi le renouvellement, le retour sur l'investissement lié au renouvellement a été important. De plus, nous n'avons pas chiffré l'augmentation de productivité observée dés le 1er cycle des cochettes du fait de la diminution importante des pertes sous la mère.



    Commentaires

    Ce cas suscite plusieurs éléments de réflexion :

    Interprétation d'un profil sérologique sur animaux vaccinés et utilisation du vaccin inactivé dans un protocole d'éradication.


    Pour les troupeaux indemnes, il est établi que la vaccination des truies avec un vaccin inactivé n'induit pas ou peu de séroconversion jusque 3 injections vaccinales. Après la 4ème injection, le taux de séroconversion est beaucoup plus élevé mais la décroissance des anticorps est rapide et les animaux redeviennent négatifs après environ 8 semaines. Aussi, et comme l'a montré le cas présenté, l'utilisation du vaccin SDRP inactivé n'est pas un frein à la mise en place d'un protocole d'éradication et il peut être utilisé dans ce cadre.
    Le profil réalisé dans l'élevage vacciné présenté est interprétable car la vaccination ne remet pas en cause le caractère très hétérogène des résultats et par la même la classification d'instable.

    Taux de faux positifs

    Comme tout test analytique, la sérologie ELISA IDDEX est à interpréter avec précaution. Avec la 2ème génération du test utilisée actuellement, le taux de faux positifs retrouvé lors du 1er dépistage (1,6%) et du 2nd (2,2%) n'est pas surprenante. Dans le cadre d'un protocole d'éradication, cette limite doit être connue.

    En ce qui concerne la qualification des élevages (selectionneurs et multiplicateurs), c'est une source de litige importante qui oblige parfois à avoir recours à d'autres techniques analytiques.

    Evaluation du risque de la technique (déstabilisation, contamination aérienne…)


    Comme toute démarche de ce type, les risques associés étaient multiples :

    Risque de déstabilisation sanitaire


    Pour limiter ce risque, il a été mis en place un plan de vaccination lourd visant à limiter toute contagion brutale du nouveau cheptel.
    D'autre part, le respect des mesures proposées aux éleveurs pour limiter tout transfert de germe de l'ancien au nouveau troupeau a garanti le succès de l'opération. Il est évident qu'une telle démarche ne doit pas être mise en place sans le consentement total des éleveurs.

    Risque d'échec de l'éradicatio
    n

    La réussite de notre protocole remet en cause l'importance de la contamination aérienne.

    A quoi attribuer cette réussite ?

    o effet fermeture de l'élevage pendant 3 mois ce qui a permis de stabiliser et peut-être suspendre la circulation virale ? Dans ce cas, comment expliquer que les symptômes récurrents en maternité persistaient dans les mises-bas de l'ancien cheptel quand ils ont cessé dés les premières mises bas de cochettes ?

    o effet protection vaccinale qui suffit à limiter ou stopper la contagion des cochettes

    o effet propre à la contamination par aérosol qui dans les conditions du terrain serait très limitée

    Il est très difficile de mettre le doigt sur les véritables points ayant contribué au succès et peut-être n'est ce pas le propos ici que de se poser trop de questions.

    Mesures de bio-sécurité à mettre en place

    En tout état de cause, des mesures strictes de biosécurité ont été mises en place après l'éradication dans le but d'éviter ou de repousser au maximum la recontamination.

    Conclusion

    Il est clair et connu que l'éradication du SDRP de façon individuelle et non régionale dans des zones à forte densité porcine présente un risque élevé lié à la recontamination du troupeau. Cependant, cet exemple montre que le retour sur investissement est exceptionnel par son ampleur et sa rapidité. Aussi, dans des cas tels que celui présenté, l'éradication de cette maladie doit être une des alternatives à proposer, avec ses limites, dans le cadre du suivi d'un élevage.
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