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Les morsures de queues (I)

Il n'est pas rare de trouver des exploitations porcines où les animaux présentent des blessures sur la queue. Cette situation est provoquée par un trouble du comportement dénommé morsure de queue ou caudophagie.

Introduction

Il n'est pas rare de trouver des exploitations porcines où les animaux présentent des blessures sur la queue. Cette situation est provoquée par un trouble du comportement dénommé morsure de queue ou caudophagie. Parmi les pays ayant mené des études épidémiologiques sur cet aspect, 0,68 % des animaux abattus était porteur du problème (environ 1,2 millions d'animaux seraient concernés sur un total de 180 millions de porcs abattus chaque année dans l'Union Européenne).

La caudophagie est un problème grave qui nuit au bien-être et à la productivité des animaux et se propage de manière relativement aisée parmi les animaux d'une exploitation.

La caudophagie survient en deux phases. La première, durant laquelle l'animal qui présente ce comportement lèche ou mordille doucement la queue d'un autre porc, ce dernier ne présentant pas de blessures et ne ressentant pas de douleur dans la mesure où il tolère le comportement de son compagnon. La seconde phase semblerait débuter lorsque les animaux affectés présentent déjà des blessures. Certains auteurs considèrent que la caudophagie proprement dite est précédée par un comportement dénommé " queue dans la bouche " qui induit, en fonction de divers facteurs, l'apparition du mordillage.

Conséquences de la caudophagie

La caudophagie possède des conséquences à deux niveaux. Premièrement, cela suppose, pour l'animal mordu, un problème grave de bien-être car les morsures sont douloureuses et peuvent engendrer des problèmes infectieux. Cette situation finit par nuire au comportement alimentaire du porc et, de ce fait, à son état nutritionnel. En outre, les infections dans cette zone tendent à se propager affectant ainsi l'épine dorsale, les poumons, les reins et les extrémités. Ce comportement facilite également la transmission des maladies entre animaux. La tendance à être mordu sur la queue fait que le même animal reste indemne de toute morsure sur d'autres parties du corps comme les oreilles ou l'abdomen.

On observe typiquement des queues blessées lors de crise de caudophagie, mais d'autres parties du corps des animaux peuvent être touchées.
La caudophagie est à l'origine de blessures importantes chez les animaux, qui peuvent s'aggraver et infecter d'autres parties.

Deuxièmement, l'apparition d'une crise de caudophagie dans une exploitation indique généralement qu'il existe des problèmes de conduite d'élevage qui affectent négativement les animaux. Ces problèmes concernent différents facteurs tels que l'alimentation, la densité des animaux ou le type de sol. Le facteur principal, comme nous le verrons ultérieurement, est l'absence de stimuli, c'est-à-dire le manque de matériel qui permet aux animaux d'exprimer leur comportement exploratoire.

Origine de la caudophagie

La caudophagie est donc un problème important provoqué par un trouble du comportement du porc. En éthologie, ce phénomène est appelé comportement redirigé. Cela signifie que ce comportement est normal en soi mais qu'il se dirige vers des cibles distinctes des habituelles.
Dans le cas de la caudophagie, le comportement normal serait le comportement exploratoire qui sert à trouver de la nourriture. Il est intéressant de souligner que, dans des conditions naturelles, le porc passe environ 80 % du temps où il est éveillé à manifester ce comportement exploratoire (l'activité exploratoire se réalise principalement via le comportement de fouille).

Certains auteurs suggèrent que la caudophagie trouve son origine dans le comportement de succion, notamment chez les animaux qui ont été sevrés de manière prématurée.

Le comportement de morsure des queues répond à un besoin d'exprimer les comportements exploratoires.

On a observé que les crises de caudophagie ont tendance à se propager au sein du même élevage. Et ceci pour deux raisons : d'une part, les conditions ayant provoqué la crise dans l'élevage se retrouvent dans le reste des bâtiments et des animaux ; on peut donc, en toute logique, s'attendre à ce que le problème se produise ailleurs. En outre, on a constaté que les animaux peuvent "copier" les comportements qu'ils observent. Autrement dit, lorsqu'un porc en voit un autre mordiller la queue d'un troisième, il finit par apprendre à réaliser ce comportement, notamment si les conditions qui l'ont provoqué sont les mêmes. La démonstration de ce processus d'apprentissage repose sur le fait que les crises de caudophagie qui apparaissent dans une case déterminée tendent à apparaître ensuite dans les cases contigües.

Divers facteurs internes (propres à l'animal) et externes (environnement et installations) sont à l'origine de la caudophagie. Peu de changement pourra être apporté aux premiers alors que les seconds sont considérés comme des facteurs de risques et seront envisagés de manière plus approfondie dans le chapitre suivant. Parmi les facteurs propres à l'animal, la race ne semble pas influer outre mesure, mais il a été démontré que le sexe et l'âge des animaux jouent un rôle. D'une part, les queues des mâles sont en général plus mordues que celles des femelles. Autrement dit, les femelles font preuve de plus de caudophagie que les mâles et elles expriment ce comportement envers eux. D'autre part, le risque de caudophagie semble être maximal lorsque les animaux atteignent 40 à 50 kg.

Commentaires de l'ISPAIA

Une étude de cas publiée dans la revue de l'American Association of Swine Veterinarians (janvier 2004) confirme l'atteinte plus marquée des mâles. Les auteurs ont estimé que le risque d'être mordu pour un mâle castré était 2,6 fois plus important que pour une femelle. Au bilan, 16,3% des 1875 porcs suivis et engraissés dans deux bâtiments similaires ont été concernés par la caudophagie (22 à 43 porcs par case). Point remarquable, plus la proportion de cochettes était importante et plus le pourcentage de mâles mordus était élevé. Le pourcentage de cochettes mordues n'était par contre pas influencé.

Ce constat est mis en relation avec des observations comportementales faites au cours de l'étude. Lors des manipulations, les cochettes avaient tendance à aborder les techniciens en face à face alors que les mâles optaient plutôt pour une position inverse. On peut alors imaginer que lors de confrontation entre animaux, la queue des mâles seraient peut-être tout simplement plus accessible. Autre élément déjà proposé par le passé : les animaux à fort développement pourraient être plus passifs, moins réactif à une morsure. Or les lésions de faible intensité ou débutantes touchent des animaux plus lourds et les mâles de cet essai sont comme souvent plus lourds que les cochettes. A l'inverse, les lésions plus sévères concernent des animaux plus légers. On peut sans doute voir là l'effet négatif du cannibalisme sur la croissance.

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